mercredi 16 avril 2025

Darwin, le dernier chapitre de Michel Moatti


Je viens de compléter la lecture de «Darwin, le dernier chapitre» de Michel Moatti, un roman (ou récit) historique publié en 2024. Ce livre a reçu le Prix Max Gallo du roman historique la même année. Le roman est largement inspiré des carnets de voyage de Darwin et du journal de bord du capitaine Robert FitzRoy. L'auteur y entremêle habilement des faits historiques et des éléments fictifs pour offrir une reconstitution vraisemblable de cette expédition.


Je me permets ici une parenthèse pour brièvement raconter la petite histoire des carnets de Darwin qui ont permis la réalisation de ce projet d'écriture de Moatti. Durant le voyage du Beagle (1831-1836), Darwin prit des notes dans quinze carnets. En l'an 2000, deux petits carnets de Darwin ont été retirés des archives de la bibliothèque de l’Université de Cambridge pour être photographiés, mais ils ont subrepticement disparu. Il est facile d'imaginer que ces carnets ont une valeur inestimable sur le plan scientifique et historique. D'ailleurs, un de ces carnets contient «l'arbre de la vie» dessiné par Darwin, un croquis fondamental dans le développement de sa théorie de l’évolution. Pendant un certain temps, l'université a cru qu’ils avaient simplement été mal rangés dans l'immense collection de la bibliothèque. Finalement, en 2020,  la bibliothèque a officiellement déclaré la disparition des carnets et a lancé un appel au public pour les retrouver en considérant qu'il pouvait s’agir d’un vol. Et bien, croyez-le ou non, deux ans plus tard, contre toute attente, les carnets ont été retrouvés dans un sac de magasinage rose déposé anonymement à l’intérieur de la bibliothèque, avec un mot disant simplement - «Librarian, Happy Easter».  Aujourd'hui, les carnets sont en sécurité et ils ont été numérisés pour être consultables en ligne. Cette histoire rocambolesque est devenue l’un des cas de disparition d’archives les plus bizarres du monde universitaire.

Alors, le récit débute en décembre 1831, lorsque le HMS Beagle quitte Plymouth pour une expédition de cinq ans autour du monde. À son bord se trouve Charles Darwin, un jeune naturaliste de 22 ans invité par le capitaine Robert FitzRoy afin de lui tenir compagnie et de l'aider à surmonter la mélancolie des longs voyages. Il lui avait été recommandé par un ami d'un ami. Ce voyage mènera le navire en Terre de Feu, en Patagonie et au-delà. C'est ce voyage qui permit à Charles Darwin de recueillir les matériaux de sa future théorie de l’évolution. Moatti intègre du mystère dans le volet fictif  de l'aventure. Il y aura des événements étranges, des disparitions, des hallucinations et aussi l'ombre du précédent capitaine qui s'est suicidé, qui planera sur l'équipage. Malgré cette ambiance et le mal de mer, Darwin collecte des spécimens et consigne ses observations. Beaucoup de spécimens, des insectes, des plantes, des oiseaux, des poissons, des mammifères, qu'il expédie en Angleterre dès qu'il en a l'occasion.
Le Darwin habituel











Le Darwin à bord du HMS Beagle
 L'auteur veut nous faire voir et entendre un jeune Darwin, et non pas le vieux savant barbu auquel l’imaginaire collectif est habitué. Ainsi, il utilise certains personnages pour mettre de l'avant les tensions entre science et religion. Il tente de faire ressortir les défis intellectuels et psychologiques auxquels Darwin est confronté. Il est tiraillé entre son éducation religieuse et les doutes que ses observations font naître en lui. Peut-il vraiment remettre en question l’ordre divin? Notre jeune Darwin est parfois dépassé par l’étrangeté du monde qu’il découvre. À cela s'ajoute la vie à bord d'un petit navire, les conditions de voyage sont rudes et les marins, superstitieux, se méfient de Darwin et de ses collections de bestioles.

Même si Moatti à une belle plume qui se lit bien que l'intégration des extraits de carnets, de lettres, et de réelles réflexions de Darwin est réussie, de mon point de vue, il n'arrive pas à créer de suspense. On demeure plutôt dans un documentaire romancé d’un grand voyage scientifique. Quoiqu'il explore davantage les doutes de Darwin face à ce qu'il découvre. Il fait vivre Darwin pour le lecteur. Malheureusement, la rigueur historique de Moatti fait en sorte que le récit est lent et perd l'attention du lecteur. Il y a parfois de longues descriptions, des monologues et peu de rebondissements avant les derniers chapitres. Ce n’est qu’à la fin que le roman installe un peu de tension. C’est là que certains événements mystérieux sont élucidés. Je m'attendais à plus d'intrigue autour du personnage central que devait être Darwin. Si vous êtes un fan de Charles Darwin, vous avez là une nouvelle version d'une partie de sa biographie avec un accès à ce qui se passe dans sa tête. 


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The Complete Work of Charles Darwin Online

https://darwin-online.org.uk/




mardi 15 avril 2025

Un nouveau site web au sujet de la prévention des collisions entre les oiseaux et les bâtiments


L'Alliance pour la prévention des collisions avec les oiseaux est une coalition d'agences, de groupes de conservation, de scientifiques, d'architectes, de chefs d'entreprise, de professionnels de la santé et de membres de la communauté engagés à rendre l'environnement bâti plus sûr pour les oiseaux. Lancée en 2024, l'Alliance a travaillé ensemble pour promouvoir de nouveaux traitements des fenêtres, des pratiques d'éclairage responsables et une action collaborative. L'Alliance vient de lancer un nouveau site web rassemblant des informations sur cette question, avec des sections sur les raisons pour lesquelles les oiseaux frappent les vitres, les solutions (y compris les traitements des fenêtres, les recommandations en matière d'éclairage et d'aménagement paysager, la manière de s'impliquer, et la conception générale de la sécurité des oiseaux), un engagement du public à agir, des médias pour sensibiliser, des FAQ, et plus encore.

Le site web:

Bird Collision Prevention Alliance - Help Keep Birds Safe From Collisions

https://www.stopbirdcollisions.org


mardi 1 avril 2025

Quelques études scientifiques récentes portant sur les oiseaux


Les poubelles permettent de dater les nids d'oiseaux

Des chercheurs ont découvert un nid d'oiseaux constitué de couches de plastique datant d'il y a 30 ans. Le nid de Foulque macroule (Fulica atra) a été prélevé dans un canal d'Amsterdam. Les couches extérieures contenaient une douzaine de masques faciaux datant de la pandémie et la base contenait un emballage de barre Mars faisant la promotion de la Coupe du monde de football de 1994. Habituellement, les foulques construisent un nouveau nid chaque année, mais dans les villes, « la réutilisation des fondations des anciens nids en plastique peut permettre de gagner du temps, en donnant à ces oiseaux plus d'occasions de chercher de la nourriture ou de défendre leur territoire », suggère le biologiste Auke-Florian Hiemstra, qui a dirigé les travaux. «Mais tous ces masques dans leurs nids - notre couche pandémique - sont un piège dangereux pour les foulques, avec leurs pieds trapus qui ressemblent à ceux des dinosaures».

L'étude originale: 

Birds documenting the Anthropocene: Stratigraphy of plastic in urban bird nests

https://esajournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/ecy.70010


Sur le même sujet:

Quand les oiseaux bâtissent leurs nids avec des déchets par Charles Prémont, Québec Science


Impact d'une éclipse solaire sur le comportement des oiseaux

Une étude utilisant un réseau de bioacoustique a révélé une diminution significative des vocalisations d'oiseaux en Amérique du Nord lors de l'éclipse solaire totale du 8 avril 2024. Les oiseaux ont adopté des comportements nocturnes tels que le repos, particulièrement dans les zones où l'obscuration solaire dépassait 99 %.

L'étude originale:

Continental-scale behavioral response of birds to a total solar eclipse

https://www.nature.com/articles/s41598-025-94901-6


Les collaborations se poursuivent même au milieu du conflit

Les scientifiques d'Israël, des territoires palestiniens et des pays voisins continuent de travailler ensemble, même après 15 mois de guerre. Ainsi, en janvier, 60 experts palestiniens, jordaniens et israéliens se sont réunis à Athènes pour discuter de la manière de résoudre les problèmes d'eau et d'autres problèmes environnementaux dans la région. Mais le poids du conflit pèse lourdement sur la communauté scientifique de la région : par exemple, les chercheurs et les universités d'Israël sont confrontés à des boycotts formels et informels, tandis que les chercheurs et les administrateurs de Gaza doivent faire face à la destruction totale de leurs institutions. « J'espère qu'après le cessez-le-feu et lorsque les choses se seront calmées, les collaborations se développeront au Moyen-Orient », déclare le physicien quantique Roee Ozeri. «D'une manière générale, je pense que la science est un grand pont entre les gens et entre les nations.» Ils poursuivent notamment le suivi des chouettes et des hiboux.

L'étude originale :

Science is happening: Israeli and Palestinian scientists continue collaborations amid conflict

https://www.nature.com/articles/d41586-025-00692-1


Regardez ce drone inspiré d'un oiseau sauter dans les airs - Des pattes mécaniques légères permettent à ce drone à voilure fixe de naviguer sur des terrains compliqués. Par Dan Fox, Nature

Voici RAVEN, le Robotic Avian-inspired Vehicle for multiple ENvironments (véhicule robotisé inspiré des oiseaux pour des environnements multiples). Les chercheurs se sont inspirés de l'anatomie aviaire pour concevoir ce drone équipé de pattes légères, semblables à celles d'un oiseau, qui lui permettent de marcher, de sauter et même de s'élancer dans les airs et de prendre son envol. L'équipe qui a construit RAVEN pense que les principes de conception sous-jacents pourraient être utilisés pour fabriquer des robots encore plus polyvalents, capables d'utiliser plusieurs modes de déplacement.

Le reportage video (disponible en français)

https://youtu.be/ewYISBNg-6k

L'étude originale :

Fast ground-to-air transition with avian-inspired multifunctional legs

https://www.nature.com/articles/s41586-024-08228-9


L'intelligence artificielle révèle le langage des oiseaux - Les Corneilles noire émettent un très grand nombre de sons différents ; l'intelligence artificielle pourrait nous aider à comprendre leur signification. Par Emily Bates, Nature

Le reportage video (en anglais)

https://youtu.be/KG9GdpV4adU

Des chercheurs ont écouté une famille inhabituelle de Corneille noire en Espagne, recueillant des données sur des centaines de milliers de sons différents émis par les oiseaux. De petits microphones ont enregistré une variété de cris doux, bien plus silencieux que les « croassements » familiers que l'on entend habituellement. L'équipe a ensuite utilisé l'intelligence artificielle pour analyser les sons et les regrouper. Les chercheurs espèrent pouvoir un jour comprendre la signification des vocalisations des oiseaux et peut-être même essayer de parler leur langue.

L'étude originale :

Synthetic data enables context-aware bioacoustic sound event detection

https://arxiv.org/abs/2503.00296

Le site web du groupe de recherche :

https://www.cooperativecrows.com