mercredi 28 avril 2021

L'intelligence artificielle développe une «oreille» pour le chant des oiseaux au profit de BirdNET

 

Je vous résume ici un article du magazine Scientific American. On apprend que cet été plus de 2 000 oreilles électroniques enregistreront le paysage sonore de la chaîne de montagnes de la Sierra Nevada en Californie, générant près d'un million d'heures d'audio. Pour éviter de passer des années à les décoder, les chercheurs s'appuient sur l'intelligence artificielle.

De tels enregistrements créent un portrait sonore ponctuel de la faune présente et pourront éventuellement aider à la conservation de la biodiversité. Le paysage sonore de la Sierra Nevada contient justement des informations cruciales sur la façon dont les incendies de forêt de l'année dernière ont affecté les oiseaux vivant dans les différents habitats de la région. Les enregistrements pourraient révéler comment certaines espèces ont mieux réagi à la catastrophe.

«Les données audio sont un véritable trésor, car elles contiennent de grandes quantités d'informations», déclare l'écologiste Connor Wood, chercheur postdoctoral à l'Université Cornell, qui dirige le projet Sierra Nevada. 

Les configurations d'apprentissage automatique de ces systèmes utilisent un «réseau de neurones» (les algorithmes) à l'image du cerveau humain, nous explique Stefan Kahl, expert en apprentissage automatique au Centre de conservation bioacoustique de Cornell et à l'Université de technologie de Chemnitz en Allemagne. Il a construit BirdNET, le fameux «Shazam» des oiseaux, l'un des systèmes de reconnaissance des chants aviaires les plus utilisés aujourd'hui.  Les enregistrements de la Sierra Nevada seront analysés avec BirdNET.


De tels systèmes commencent par analyser de nombreux intrants, dans le cas qui nous occupe, des milliers de chants et de cris d'oiseaux enregistrés déjà étiquetés aux espèces correspondantes. Le réseau neuronal apprend alors lui-même quelles fonctionnalités peuvent être utilisées pour associer une nouvelle entrée (dans ce cas, un chant d'oiseau) à une étiquette (l'espèce de l'oiseau). Ce sont des millions de caractéristiques extrêmement subtiles qui permettent de faire le lien entre le chant et l'oiseau. C'est que les systèmes d'apprentissage automatique peuvent également reconnaître les nuances régionales. 

Ces systèmes ont bénéficié des progrès récents de la technologie de reconnaissance de la parole humaine et de la musique. En collaboration avec Andrew Farnsworth du Cornell Lab of Ornithology, des experts du Music and Audio Research Laboratory de l'Université de New York se sont appuyé sur leur expérience musicale pour construire un système d'identification des cris d'oiseaux appelés BirdVox. Il détecte et identifie les oiseaux qui migrent la nuit et distingue le chant des oiseaux des bruits de fond.


La qualité de l'apprentissage de chaque système dépend en grande partie de la quantité d'enregistrements pré-étiquetés disponibles. Une mine de données de ce type existe déjà pour les oiseaux communs. Il est estimé qu'environ 4,2 millions d'enregistrements sont disponibles en ligne pour 10 000 espèces. Mais la plupart des quelque 3000 espèces que BirdNET peut identifier se trouvent en Europe et en Amérique du Nord, et BirdVox se concentre davantage sur les chants d'oiseaux basés aux États-Unis. Les ornithologues amateurs peuvent également aider à améliorer le référentiel des chants d'oiseaux.  L'application BirdNET pour les cellulaires connaît un grand succès puisque plus de 300 000 enregistrements s'ajoutent à la base de données des chercheurs chaque jour.



L'article original:

«Artificial Intelligence Develops an Ear for Birdsong - Machine-learning algorithms can quickly process thousands of hours of natural soundscapes» By Harini Barath on April 26, 2021, Scientific American web page.

https://www.scientificamerican.com/article/artificial-intelligence-develops-an-ear-for-birdsong/



lundi 26 avril 2021

Ma troisième année du projet «FeederWatch» 2020-2021

 

Le projet «FeederWatch» de surveillance des mangeoires dans notre cour ou ailleurs se termine aujourd'hui. Les images jointes présentent dans un premier temps le résultat global en nombre d'espèces et en nombre d'individus par période d'observation et dans un deuxième temps, la tendance des trois années pour le Cardinal rouge. Il semble effectivement y avoir eu un peu plus de Cardinal rouge cette année comme à bien endroits au Québec.

Les 24 périodes d'observation de l'année 2020-2021

Les tendances pour le Cardinal rouge sur les trois ans d'observation


lundi 12 avril 2021

Rencontre impromptue avec un Harfang des neiges...


En route pour un séjour dans le bois, on fait un arrêt au Quai de Portneuf pour observer les oiseaux. Il y a parfois quelques espèces de canards de présent à cet endroit. Je prends mes jumelles et je longe le quai... Goélands, Cormorans... Je me dirige vers la marina qui forme une sorte d'enclos avec les brise-lames qui la borde, un couple de colvert.... Je marche lentement sur un des brise-lames pour observer un Bruant chanteur qui se trouve au centre à l'abri d'un arbuste... et là, je vois une grosse masse grise tachetée de beige. Au même moment où je me dis dans ma tête «Méchant gros goéland...»... la bête s'envole et je constate que c'est un très gros Harfang des neiges. Je lève mes jumelles pour l'observer en me disant que je viens de le faire partir, mais voilà qu'il se pose cinquante mètres plus loin sur l'autre côté du quai; moi je me trouve au centre. Il est devant moi et je l'observe avec mes jumelles. Il y a d'autres personnes qui marchent de ce côté et le harfang redécolle dans ma direction. Je texte Louise avec des majuscules «HARFANG DES NEIGES...». Il passe au-dessus de moi et se pose sur une grosse roche en bordure du chemin qui mène au bout du quai. Je n'ai pas ma caméra, alors je saisis mon cellulaire et je fais une vidéo en me déplaçant doucement dans sa direction. Je prends quelques photos avec le téléphone.

Harfang des neiges
Photo Robert Allie

Je me dirige ensuite vers la voiture pour aller chercher ma caméra. En croisant Louise, je lui indique où il se trouve. En revenant vers le Harfang, je constate qu'il est descendu de sa roche probablement pour se mettre un peu plus à l'abri du vent parce qu'il vente énormément... Je fais quelques clichés sans trop m'approcher, il nous regarde. Il observe tout autour de lui sans bouger d'endroit. Après quelques minutes, on quitte l'endroit pour compléter nos observations autour du quai.

Harfang de neiges
Photo Robert Allie

Il s'agissait probablement d'une femelle Harfang des neiges adulte d'après son allure. Qu'est-ce qu'elle faisait à cet endroit? Peut-être une période de repos avant de poursuivre sa route vers le nord...


samedi 10 avril 2021

L’odorat de l’Urubu à tête rouge a fait l’histoire…


L'Urubu à tête rouge (Cathartes aura) est un nécrophage qui se nourrit essentiellement de charognes; les animaux morts tels que les cerfs le long de nos autoroutes. Eh bien, il y a eu pendant des années un débat à savoir si l’Urubu à tête rouge trouvait son alimentation à la vue ou à l’odorat. Mais pourquoi ce débat a-t-il fait l’histoire? Parce qu’il a opposé deux personnages flamboyants à leur époque, John-James Audubon et Charles Waterton et parce que la réponse définitive à la question nous est venue beaucoup plus tard des gazoducs…


Urubu à tête rouge
Photo: Robert Allie

Il y avait depuis très longtemps deux écoles de pensée au sujet de la façon dont les «vautours», dans le sens général des charognards, trouvaient leurs proies. Les trouvaient-ils à l’aide de la vision ou de l’odorat? Aududon était de ceux qui croyaient que les oiseaux n’avaient pas un bon odorat et il publia en 1826 un article enflammé pour prouver son point «An Account of the Habits of the Turkey Buzzard (Vulture) particularly with the view of exploding the opinion generally entertained of its extraordinary power of smelling.»… Ce papier n’a pas eu l’effet escompté et la communauté «scientifique» (en pleine création) était partagée. C’est alors que Waterton publie une réponse avec autant d’éclat et assez sarcastique pour contrer le point de vue d’Audubon. Il mentionne quelque chose comme «Je n'ai jamais pensé vivre assez longtemps pour voir cet oiseau privé de son nez» ou encore « le vautour n’a pas été tué par l’artillerie de cet auteur», etc. Les deux ont effectué des expériences avec des carcasses pour démontrer leur point de vue. La majorité des personnes concernées par ce débat se sont tout de même rangées du côté d’Audubon principalement parce qu’il était un gentleman plus apprécié et moins excentrique que Waterton réputé pour être un bon conteur de blagues grivoises. Aujourd’hui, ces deux hommes seraient davantage considérés comme des artistes plutôt que des scientifiques. Quelques années plus tard, Charles Darwin qui connaissait les deux personnages a avancé que les arguments en faveur ou à l’encontre des capacités olfactives des «vautours» étaient plutôt équilibrés. Ainsi, la question n’était pas réglée. Elle a plutôt été poussée sous le tapis pour des dizaines et des dizaines d’années.


C’est alors que l’histoire nous raconte, de façon plus ou moins anecdotique, qu’un employé de l’Union Oil Company of California (fondé en 1890) aurait remarqué vers 1938 que des «vautours» se rassemblaient le long des lignes de gazoducs aux endroits où des fuites de gaz se produisaient. L’observation des Urubus en serait même devenue une méthode de surveillance du réseau. Cette observation s’est rendue aux oreilles de Kenneth Stager, ornithologue au Musée d'histoire naturelle du comté de Los Angeles. Il entreprit de faire de ce sujet l’objet de ses études doctorales. Après quelques années de recherche et d’expérimentation sur le terrain, il publia sa thèse en 1962 et un premier papier public en 1964. Avec «The Role of Olfaction in Food Location by the Turkey Vulture», Stager confirma que les Urubus à tête rouge étaient attirés par l’odeur de l’éthylmercaptan… Ce composé chimique est un agent odoriférant ajouté au gaz naturel inodore justement pour le rendre perceptible. Or, l’éthylmercaptan est aussi le gaz dégagé par une carcasse en décomposition!!! Les expériences de Stager ont permis de constater la place prépondérante de l’odorat dans la quête alimentaire de l’Urubu à tête rouge sans être exclusive puisqu’il utilise aussi sa vue.


D’autres recherches complémentaires autour de l’anatomie des urubus ont permis de constater que le bulbe olfactif de l’Urubu à tête rouge, l’endroit où les odeurs sont analysées dans le cerveau, est quatre fois plus gros que celui de l'Urubu à tête noire. L’Urubu à tête rouge est d’ailleurs considéré comme un des oiseaux ayant le meilleur odorat. Cela lui permet d’ailleurs de repérer des carcasses d’animaux morts qui sont bien cachés sous le couvert forestier. Toutefois, en ce qui concerne son régime alimentaire, saviez-vous que l’Urubu à tête rouge va davantage consommer des carcasses de petits animaux, car son bec n’est pas suffisamment fort pour entailler la peau des plus gros animaux comme les cerfs. Dans ces cas, il va plutôt profiter du travail des mammifères carnivores comme les renards ou des collisions entre la faune et les automobiles. D’où l’hypothèse voulant que la répartition géographique de l’Urubu à tête rouge se soit développée au même rythme que le réseau routier nord-américain.

Revenons au débat qui a fait l’histoire, il semble que l’obstination de nos deux belligérants, Audubon et Waterton ait peut-être été fondée sur un malentendu dès le départ. En effet, il est possible qu’Audubon ait étudié davantage l’Urubu à tête noire qui n’a pas un odorat particulièrement efficace alors que Waterton s’époumonait à vanter l’odorat de l’Urubu à tête rouge…



Robert Allie


Sources :

All About Birds, «Do Vultures Find Dead Animals By Smell Or By Tracking Predators Or Scavengers On The Ground?», April 1, 2009
https://www.allaboutbirds.org/news/do-vultures-find-dead-animals-by-smell-or-by-tracking-predators-or-scavengers-on-the-ground/

Atherton, Kelsey D.,«Gas Leaks Are Designed To Attract Turkey Vultures - Carry on, carrion birds» by, January 26, 2016
https://www.popsci.com/gas-leaks-are-designed-to-attract-turkey-vultures/

Audubon , J.J., «An Account of the Habits of the Turkey Buzzard (Vulture) particularly with the view of exploding the opinion generally entertained of its extraordinary power of smelling.», December 1826, presented to the Edinburgh Natural History Society.

Eaton, Joe, «When It Comes to Smell, the Turkey Vulture Stands (Nearly) Alone», October 7, 2014
https://baynature.org/article/comes-smell-turkey-vulture-stands-nearly-alone/

Espace pour la vie
https://espacepourlavie.ca/faune-biodome/urubu-tete-rouge

Grison, Benoît, «Du flair de Waterton à l’odorat des oiseaux - Les vautours repèrent-ils les carcasses à l’odeur ?» par, mai 2020, Pour La Science No 512
https://www.pourlascience.fr/sr/histoire-sciencesdu-flair-de-waterton-a-l-odorat-des-oiseaux-19388.php

Grigg, N.P., Krilow, J.M., Gutierrez-Ibanez, C. et al., «Anatomical evidence for scent guided foraging in the turkey vulture», Sci Rep 7, 17408 (2017).
https://rdcu.be/b4p7k

Manaugh, Geoff, «Avian Infrastructure», BLDBlog, January 24, 2016
https://www.bldgblog.com/tag/turkey-vultures/

Stager, Kenneth E., « The Role of Olfaction in Food Location by the Turkey Vulture (Catharthes Aura)», Contribution in Sciences, No.81, June 1964
https://www.biodiversitylibrary.org/part/241029

Stager, Kenneth E., «Avian Olfaction», American Zoologist, Volume 7, Issue 3, August 1967, Pages 415–420.
https://doi.org/10.1093/icb/7.3.415

Sundstrom, Bob, «Turkey Vultures and Gas Pipelines - This nose knows!», Podcast BirdNote
https://www.birdnote.org/listen/shows/turkey-vultures-and-gas-pipelines

Yang, Melissa, «By Shattering the Vuture’s Nose», The Goose, 2020, Vol.18 No.2, Article 33
https://scholars.wlu.ca/cgi/viewcontent.cgi?article=1651&context=thegoose

Weber, Hank on May 12, 2020 «Can You Smell It?», BirdsWatchers Blog
https://otwtb.birdwatchersdigest.com/reflections-on-birds/can-you-smell-it/

Wikipédia, «L'Urubu à tête rouge», page visitée en avril 2021
https://fr.wikipedia.org/wiki/Urubu_%C3%A0_t%C3%AAte_rouge

jeudi 8 avril 2021

Les mouvements hivernaux des Harfangs des neiges en fonction du territoire occupé


J'ai fait référence au travail de l'équipe du Projet SnowStorm à quelques reprises, voici qu'ils publient des résultats fort intéressants de leur suivi des Harfangs des neiges.

Rebecca McCabe, candidate au PhD et adjointe de recherche au Hawk Mountain Sanctuary (HMS), le biologiste Jean-François Therrien, et des collègues de l'Université de Saskatchewan, de l'Université Laval, et du projet SNOWstorm ont récemment publié leur recherche sur les mouvements hivernaux des Harfangs des neiges dans le dernier numéro de «Ornithology», Volume 138, 2021, pp. 1–12.

 Vous pouvez également consultez l'infographie ci-dessous pour connaître leurs découvertes !

Les deux types de comportement «Nomade» et «Résident»

Les Harfangs que nous observons dans la Montérégie semblent être plutôt du type «Résident» puisqu'ils occupent généralement les mêmes champs tous l'hiver.



samedi 3 avril 2021

Michel, les oiseaux et les humains - La Presse Plus


Bonjour,

Cette petite bande dessinée de La Presse Plus a été diffusée sur le forum Ornitho-Qc par Richard Guillet... Les illustrations sont de Judith Lachapelle. Jetez-y un coup d'oeil...

La première case...




A+

Robert Allie